Moutmout

Le blog du Moutmout

Astronomie, informatique, reflexions diverses

On a découvert de la vie sur la Lune ???

Histoire d'une curieuse découverte pendant Apollo 12

Lecture de 5 Minutes

Astronautes d'Apollo 12 à côté de Surveyor.

La Lune s’est formée il y a 4,6 milliards d’années lors de la collision entre la Terre et un planétoïde de la taille de Mars. Plein de matière s’est retrouvée éjectée de la Terre, s’est mise en orbite, puis a coagulé pour former la Lune.

Mais avant d’envoyer des gens sur la Lune, on ne savait pas toutes ces choses là. D’ailleurs, on ne savait pas grand chose sur la Lune. Tout ce qu’on pouvait savoir à son sujet provenait de ce qu’on avait observé depuis la Terre et des informations que quelques sondes avaient glané dans les années 60. Et on se posait plein de questions à son sujet : Est-ce qu’on pouvait s’y poser, ou est-ce qu’on allait s’enfoncer comme dans des sables mouvants ? La surface était-elle faite de fromage ? Y avait-il des formes de vie extraterrestre sur la Lune ?

Les scientifiques de la NASA ne savaient pas s’il pouvaient y avoir de la vie sur la Lune. Suivant le principe de précaution, lorsque les astronautes d’Apollo 11 sont revenus sur Terre, ils ont été placés en quarantaine, et les roches qu’ils ont ramené de la Lune aussi. Armstrong, Aldrin et Collins ont été placés dans une sorte de caravane étanche pour être transportés jusqu'à un centre spécialisé de la NASA. Tout ça était fait pour s’assurer que d'éventuelles bactéries rencontrées sur la Lune ne puissent pas se disséminer sur Terre.

Cette précaution s’est avérée inutile. D’ailleurs, à partir d’Apollo 15, il n’y a plus de quarantaine pour les astronautes à leur retour de la Lune. Pourtant, lors de la mission Apollo 12, les astronautes ont permis de découvrir la présence de vie sur la Lune. Je vous explique.

En 1967, la NASA a envoyé la sonde Surveyor 3 à la surface de la Lune pour analyser le sol et prendre des photos. Quelques années plus tard, le module lunaire d’Apollo 12 s’est posé à moins de 200 mètres de Surveyor 3. Et en soi c’est déjà une prouesse technique de se poser avec autant de précision sur la Lune. Mais surtout, les astronautes étaient suffisament proches de la sonde pour s’y rendre à pied. Le rover lunaire n’a commencé à être utilisé qu'à partir d’Apollo 15, donc les astronautes d’Apollo 12 ne pouvaient pas se déplacer très loin et devaient rester dans un rayon de 400 mètres autour du module lunaire.

Du coup, les astronautes marchent jusqu'à la sonde Surveyor 3, détachent quelques éléments de la sonde, et les ramènent au module lunaire pour qu’ils puissent être étudiés sur Terre. Les scientifiques veulent étudier ces éléments dans leurs labos pour connaître l’effet d’un séjour prolongé dans l’espace sur le matériel. Quels sont les effets à long terme des rayons cosmiques ? Quels sont les effets des variations de température entre le jour et la nuit sur la Lune ? Combien de micrométéorites sont tombées ? Y a-t-il des conditions qui auraient pu endommager le matériel et qui n’ont pas été anticipées ? Etc. En plus, la caméra sur la sonde avait arrêté de fonctionner et on ne savait pas trop pourquoi. Les ingénieurs espéraient pouvoir diagnostiquer le problème en ramenant la caméra sur Terre, afin d'éviter que le problème ne se reproduise.

De retour sur Terre, les scientifiques de la NASA étudient les éléments de Surveyor 3 qui ont été ramenés de la Lune. Ils constatent que le matériel a très bien tenu le coup malgré les conditions très rudes à la surface de la Lune. Mais ils constatent aussi la présence de bactéries sur la caméra. Les scientifiques en déduisent que les bactéries ont survécu à l’aller-retour et sont restées dans un état dormant pendant leur séjour sur la Lune. Puis une fois que les conditions sont redevenues favorables, elles ont pu se réveiller et recommencer à se multiplier.

Suite à cet découverte, la NASA a décidé de mettre en place des mesures dites de protection planétaire. Le principe, c’est de stériliser au maximum tout ce qui est envoyé dans l’espace par des humains, et de s’assurer qu’aucune bactérie terrestre ne se retrouve dans un environnement extra-terrestres dans lequel elle peut prospérer. Et c’est super important, parce que si un jour, on trouve de la vie sur Mars, ou sur Titan ou ailleurs, on veut être sûrs à 100% que c’est pas des humains qui l’ont mise là.

Si un jour on découvre de la vie ailleurs que sur Terre, ça sera une découverte extrêmement importante qui nous apprendra plein de choses sur ce qu’est la vie, comment elle peut apparaître et quelles sont nos origines. Mais imagine, on envoie une sonde à la surface d’Europe, le satellite de Jupiter qui a un océan d’eau liquide sous sa surface. Mais il reste quelques bactéries sur la sonde qui ont survécu au voyage. Sur Europe, elle se sentent à l’aise et commencent à se multiplier. Dix ans plus tard, on trouve des bactéries sur Europe : c’est impossible de savoir si cette souche de bactéries vient de la Terre ou si elle est native d’Europe. Et du coup, ça devient impossible de savoir s’il y avait des bactéries sur Europe avant qu’on arrive.

Pour éviter ce scénario, la protection planétaire est prise en compte dans toutes les missions spatiales et les agences spatiales font tout leur possible pour éviter de contaminer des lieux potentiellement habitables. Par exemple, la sonde Juno qui explore Jupiter et ses lunes va être envoyée s'écraser dans Jupiter à la fin de sa mission pour être sûr qu’elle n’aille pas accidentellement contaminer une des lunes de Jupiter.

Ce samedi, c’est la nuit internationale de l’observation de la Lune. Donc si vous arrivez à voir la Lune, pensez aux bactéries qui sont peut-être encore accrochées aux premières sondes qu’on y a envoyé et qui attendent des conditions favorables pour recommencer à proliférer.


Vous pouvez écouter cette histoire dans le podcast SpaceSheep.

Image : L’astronaute Alan Bean inspecte Surveyor 3. NASA.

Pour aller plus loin

Articles Récents

Catégories

À Propos

Docteur, astrophysicienne. Je joue de l'euphonium, du clavier et du télescope quand je peux.